Ombres de mes livres

 

… où j’ai cherché à esquisser les silhouettes des 
premiers possesseurs de mes livres anciens.
 
 
 
Louis Deschamps des Tournelles
(1744 - 1795)

Le livre :

Abbé Millot : Eléments d'histoire générale

à Paris, chez Prault, 2 tomes : 1772 et 1773
L'ex-libris du possesseur
gravé par Moreau le jeune



Ecu timbré d’une couronne de marquis, supporté par deux griffons:

« D'azur au lion d'argent tenant une épée haute du même garnie d'or »

Mention : EX.LIBRIS.LVDOVICI.DES CHAMPS DES TOVRNELLES

 


 
Louis Deschamps des Tournelles
(ou Destournelles)

 
(31 mai 1744, Rouen - 27 juillet 1795, Passy)

Directeur de correspondance des domaines du roi
Vice-président du Conseil Général de Paris

Ministre des contributions et revenus publics
( = ministre des finances), 1793-1794
Un ministre durant la Révolution.
Dans l'administration des Domaines sous Louis XVI :
 
En 1760 Louis des Champs des Tournelles (orthographe de l'ex libris) commence sa carrière comme surnuméraire des Domaines à Rouen. Après différents postes en province il devient en 1770 sous-directeur de correspondance des Domaines du Roi à Paris, poste où il restera vingt ans.

Dans des actes des années 1780 il s'intitule "Directeur des domaines du Roy à Paris" mais il ne sera nommé directeur de correspondance à l'administration centrale des Domaines qu'en 1791 pour peu de temps, du fait de la Révolution.
Ardent révolutionnaire et ministre des finances :

Louis "Deschamps dit Destournelles" (orthographe adoptée sous la Révolution) prend avec enthousiasme parti pour la Révolution dès le 13 juillet 1789 où il devient capitaine dans la garde bourgeoise. Il entre au début 1791 au Club des Jacobins. Grenadier de la Garde nationale, il participe activement à la journée du 10 août. Il est nommé juré au premier Tribunal révolutionnaire puis vice-président du Conseil Général de Paris.
 
Ces gages d'ardent jacobinisme  lui permettent d'accéder, le 13 juin 1793, au poste de Ministre des Contributions et Revenus publics (l'équivalent du ministre des finances) sous la tutelle étroite de l'Assemblée.

Le ministre sent très vite combien son poste est périlleux. Il affiche un train de vie modeste, reverse une partie de son salaire pour des oeuvres républicaines, ravaude ses bas au ministère devant ses commis, etc. Ce qui ne l'empêche pas de posséder une belle fortune qui apparaitra à la lecture de son testament.

Le 1er avril 1794 Robespierre supprime les ministres et les remplace des commissions sous tutelle du Comité de Salut Public. Privé de son ministère Deschamps Destournelles ne retrouve pas son poste dans l'administration et il est même emprisonné en mai 1794 pour avoir trop défendu son frère qui sera guillotiné. La chute de Robespierre le sauve. Il trouve un poste d'examinateur au concours d'entrée de la future école polytechnique.

En avril 1795 il est menacé d'arrestation comme ancien jacobin. Il se cache à Passy où il meurt peu après des suites d'une tentative d'empoisonnement lors de son incarcération de 1794.
Un ministre menacé :

La peur du ministre de ne pas être considéré comme assez révolutionnaire transparait dans cet interrogatoire par l'Assemblée Nationale au procès des Girondins le 4 brumaire an II :

« Le Président : Vos noms ?
Le témoin : Est-il indispensable que je dise le prénom qui me fut donné à ma naissance ?
Le Président : Oui.

Le témoin : Je le profère à regret : ce prénom c'est Louis. Mes noms et surnoms sont Deschamps Destournelles Ce dernier est celui que j'ai constamment porté à dater presque de mon enfance. Il a été une sorte de signalement par lequel on m'a distingué dans une très nombreuse famille. Je n'en ai pas changé après le décret du 19 juin 1790 pour ne pas être masqué et réellement pseudonyme avec mon nom propre. Au reste je déclare que ce nom n'était point féodal car mes parents ne m'ont laissé et n'ont possédé que des biens qu'on nommait roturiers comme eux mêmes.
Le Président : Quel est votre état ?
Destournelles : Je suis ministre des contributions publiques et auparavant directeur de la régie nationale de l'enregistrement, membre de la commune du 10 août depuis sa formation, officier municipal depuis plusieurs mois, vice président du conseil général; je l'étais encore au 31 mai et jours suivants ».
Employeur du "nègre" de Mme du Barry :
 
La comtesse du Barry, maîtresse de Louis XV, a employé le jeune Zamor qualifié de "nègre", en fait originaire du Bengale.

Alors que Mme du Barry est menacée par la Révolution, Zamor y adhère fortement, ce qui provoque son renvoi de Louveciennes en 1793. Zamor dépose contre son ancienne maîtresse et contribue à ce qu'elle soit guillotinée.

Dans son testament en 1795, Deschamps Destournelles fait un leg à Zamor " nègre à mon service depuis quatre ans ", donc depuis 1791, deux ans avant son renvoi de Louveciennes par Mme du Barry. Est-ce sans lien avec l'engagement révolutionnaire de Zamor ?
La famille Deschamps :

Les Deschamps sont probablement originaires de Normandie, d'où ils se fixent à La Rochelle, puis à Bergerac. Une légende familiale indique que son plus ancien représentant, François Deschamps, aurait sauvé la vie d'Henri IV qui l'aurait anobli. En fait il apparait que les Deschamps n'ont jamais été reconnus comme nobles.

C'est une famille de réformés dont le chef, Jean Deschamps, s'est réfugié de Bergerac à Genève puis en Allemagne lors de la révocation de l'Edit de Nantes.

Son fils Gabriel, né à Bützow (Mecklembourg), revient à Bergerac et abjure le protestantisme. Il devient receveur des octrois à Rouen. Il a trois fils, dont Louis.
Sources :
 
> Gui Antonetti : Les ministres des finances de la révolution au second empire

> Page Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Gr%C3%A9goire_Deschamps_Destournelles

> Interrogatoire du ministre


> Portrait de Zamor : http://www.tombes-sepultures.com/crbst_61.html

> Chaix d'Est-Ange : Dictionnaire des familles françaises


 
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